Le site archéologique de Tamousida, situé au nord de la ville de Kénitra sur la rive gauche du fleuve Sebou, est l’un des témoins les plus remarquables de l’histoire profonde du Maroc, reflétant l’interaction humaine avec son environnement depuis des millénaires, depuis la période maurétanienne-amazighe jusqu’à la première phase phénicienne, et jusqu’à l’époque romaine.
Selon le chercheur Rachid Agrabi de l’Université Ibn Tofail de Kénitra, Tamousida “a connu une occupation humaine continue depuis le VIe siècle avant J.-C.”, soulignant que sa proximité avec le fleuve Sebou et les terres agricoles et forestières en a fait un centre commercial dynamique dès les périodes phénicienne et maurétanienne, avant d’atteindre son apogée à l’époque romaine.
Les fouilles récentes ont permis de découvrir de nombreux vestiges remontant aux périodes phénicienne et maurétanienne, confirmant l’ouverture de la ville aux échanges commerciaux avec la rive sud de l’Andalousie. La découverte d’une importante quantité de monnaies ibériques place Tamousida parmi les sites archéologiques les plus riches du Royaume, aux côtés de Salé, Banassa et Tamuda.
À l’époque romaine, Tamousida est devenue un centre militaire et administratif important, abritant un camp romain et plusieurs infrastructures urbaines avancées, comprenant temples, thermes et un port fluvial pour l’exportation des céréales, témoignant de son importance économique et militaire. Les fouilles menées entre 1999 et 2006, à l’aide de techniques de prospection géophysique, ont révélé la planification de la ville, son réseau de rues et des ateliers industriels tels que des fours à céramique et des fabriques d’amphores, soulignant son intégration dans l’économie maritime romaine.
Dans le cadre des efforts de restauration et de valorisation, un accord de partenariat a été signé en 2015 entre le ministère de la Culture, le Conseil de la Région Rabat-Salé-Kénitra, la préfecture de Kénitra et la commune d’Oulad Salama, afin de réhabiliter le site et de l’intégrer aux circuits culturels et touristiques de la région. La première phase du projet a consisté à clôturer le site, le relier au réseau routier national et créer des infrastructures scientifiques et muséales pour exposer et valoriser les découvertes archéologiques.
Selon Reda Ajram, conservateur des sites de Banassa et Tamousida, la ville “n’était pas seulement un symbole de domination romaine, mais un espace de rencontre culturelle entre Amazighs et Romains, tout en préservant l’identité originale de ses habitants”. Il ajoute que les vestiges archéologiques et le port fluvial actif offrent aux visiteurs une expérience unique pour découvrir la vie sociale et économique de l’époque.
Ajram conclut en soulignant que le conservatoire des deux sites travaille avec les autorités locales et régionales pour intégrer la dimension patrimoniale de Tamousida dans les programmes de développement territorial, affirmant que le site constitue un élément de l’identité nationale et de la mémoire collective des Marocains, ainsi qu’un espace de savoir et un centre culturel et touristique durable.

